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Pédagogie
Parole et Musique
1 décembre 2020 | Eric Antoni

Une expérience d’atelier de création musicale en collège (Année scolaire 2006-2007)

En proposant à un collège de la ville de Poitiers d’animer un atelier «Parole et Musique», je voulais diriger vers de jeunes adolescents une  activité menée  depuis de nombreuses années en milieu universitaire à Paris où j’anime des ateliers de «création musicale et théâtrale» destinés à des étudiants qui ont en général entre 20 et 25 ans. Voix, récits, poèmes, instruments mélodiques et rythmiques, pianistes et chanteurs y sont conviés à jouer, improviser, conter en vue de représentations publiques.

Les trois textes qui suivent relatent la méthode telle que je l’ai adaptée à mon nouveau «public»:

– Le premier texte La voie du milieu décrit le déroulement de l’atelier. 

– L’évolution de l’atelier vers la conception collective et spontanée d’un thème musical sur-prenant qui frappe à la fois par son caractère et son équilibre est analysée et décrite dans le deuxième texte, Le thème «sur-prise».

– Le troisième texte est consacré à quelques réflexions sur le sens et la portée de toutes les découvertes de l’atelier, c’est La profondeur de l’ordinaire.

I La voie du milieu

Le «public» du collège m’a très vite obligé à changer mes méthodes de travail. Son âge d’abord, son dynamisme et enfin son niveau de formation musicale très faible étaient autant de conditions nouvelles auxquelles j’ai dû m’adapter en simplifiant mes propositions. Des mélodies très simples facilement mémorisables ont pris la place des thèmes plus élaborés ou des partitions que je propose en universités, les rythmes se sont contentés des deux ou trois temps les plus aisément perceptibles et reproductibles.

Le travail et son développement

 Dans la salle de musique du collège où se trouvent un piano, un synthétiseur, un jeu de batterie complet, des flûtes et des tambourins, chaque élève est convié à s’approprier un instrument en jouant, accompagnant ou chantonnant un petit motif mélodique très simple. Chacun y étant parvenu, on essaie de le jouer et de le chanter ensemble. Le motif est ensuite  un peu développé jusqu’à six ou sept notes, une syllabe par note. On commence par la la la, on choisit ensuite  une phrase très banale du genre: « On est content d’être ici …» Et le travail se poursuit par associations d’idées prenant appui sur le rythme et la rime: «…c’est toujours mieux quand on rit…» etc.

Une séance se développe en trois mouvements:

1 – L’écriture collective de plusieurs couplets sur le même motif mélodique. Un élève les écrit au tableau.

2 – L’adaptation du motif mélodique aux exigences des paroles choisies et éprouvées par le groupe: la traduction d’un élan vigoureux ou d’une certaine nonchalance entraîne des modifications du parcours musical, de son tempo et de ses formules conclusives notamment, qui ne doivent pas contredire le sens des mots mais le servir etc.

3 – Les  paroles qui ont entraîné l’évolution du contenu musical doivent à leur tour répondre aux stimulations de nouveaux rythmes et de nouveaux contours mélodiques en se transformant. C’est souvent à ce moment-là qu’un tout autre point de départ (une idée, un thème…) peut être retenu, entraînant des développements verbaux et musicaux inattendus. 

 L’appréciation du travail est en partie tributaire du contenu et de l’utilité des paroles qui ont été ainsi libérées par la dynamique «lyrico-ludique» de l’atelier. J’ai parfois été très surpris par la densité et l’intensité des paroles trouvées par les élèves qui étaient rarement légères et sans portée; elles étaient souvent adressées à quelqu’un ou à une instance et liées à des situations vécues en commun plus ou moins difficilement.

     Je mentionnerai encore une autre source d’étonnement: la sûreté et la pertinence de nombreux gestes musicaux qui ont pu jaillir spontanément à la fin de certaines séances. Professeur de piano classique, je dois  convenir que des élèves formés aux techniques classiques du piano ou de la percussion n’auraient sans doute jamais osé empoigner leurs instruments avec une telle détermination, une telle inventivité et peut-être une telle cohérence. Mais rien n’est moins étonnant finalement: quand la psyché (le sens harmonique) est sollicitée en liaison avec l’intellect (percevoir, distinguer, nommer…), le corps répond en toute disponibilité sans revendiquer aucun mouvement dont il serait l’unique et tyrannique fin. Lorsque le corps n’est plus l’écran de contrôle d’un apprentissage normé mais l’instrument réfléchi du «sens harmonique», l’éveil de la spontanéité  ne conduit pas au délire mais à son inverse, une conduite maîtrisée et autonome.

Quelques remarques

     Les élèves sont toujours un peu déroutés par le pré requis qui est explicité à leur arrivée. Partir de presque rien vers un point indéterminé; accepter de ne découvrir son but qu’en l’atteignant; créer non seulement le chemin mais la manière de cheminer «on ne sait pas du tout où l’on va ni tout à fait comment…»: c’est aussi déroutant que stimulant et autant pour les musiciens confirmés de mes ateliers parisiens que pour des enfants débutants, tous habitués à répondre aux attentes stéréotypées de leurs milieux scolaires respectifs et des modèles culturels dominants.

 Le caractère du chant proposé en début de séance est évidemment très important: il doit entraîner sans exciter et prévenir toute évolution vers un défoulement stérile en posant d’emblée une exigence de justesse et de mesure. En progressant par degrés conjoints, dans un  tempo lent ou moyen, il prend l’allure d’un balancement ou d’une marche et ressemble  à une comptine ou à une chanson enfantine.  C’est à ces conditions qu’il peut devenir suggestif et servir de tremplin à une prise de parole originale et utile. C’est la voie de la tempérance qui veille à l’équilibre du sensorium perceptif

     Pour mettre en œuvre ce travail, il faut faire confiance en ce sens implicite qui relie le rythme et la mélodie en un seul mouvement, et qui s’appelle le «sens harmonique». Ainsi cette première mélodie travaillée, qui paraît souvent un peu trop banale aux élèves (ils protestent…), doit les relier au fond de leur  expérience musicale (la chanson enfantine…) à ce sens harmonique qui est à la fois propre à chacun et commun à tous, le travail de créativité où le groupe est engagé ne pouvant s’épanouir que s’il trouve là un sol favorable où s’enraciner. Un « sol favorable » cela veut dire, un corps, une psyché et un intellect (on parlait autrefois du corps, de l’âme et de l’esprit…) qui «s’accordent» à leur inscription dans le monde sonore, en une mélodie (un certain caractère de la mélodie…), un rythme (…) et une harmonie (…). C’est bien une «voie du milieu» qui est ainsi proposée aux élèves.

Pour une pratique raisonnée de l’improvisation

     Cette expérience menée dans un collège à raison d’une heure par semaine, de novembre 2007 à juin 2008 est sans doute trop limitée pour servir de support à de quelconques conclusions. Elle est venue confirmer de nombreuses observations qui l’ont précédée et m’autorise à penser que l’enseignement de la musique aujourd’hui pourrait s’enrichir d’une pratique raisonnée de l’improvisation et du recours à la parole. Sens musical et verbal, maîtrise respiratoire et invention lyrique s’épaulant au lieu de s’exclure ou de s’ignorer, trouvent dans le corps et l’histoire du «sujet musicien» bien plus un carrefour de communication et de stimulation mutuelle que le théâtre d’ombre et de confusion que l’on pourrait redouter. «Sujet musicien» mais aussi, bien sûr, «sujet» tout court: la méthode est assez structurante pour intéresser des psychothérapeutes, des ethno sociologues ou musicologues tout autant que des professeurs de musique et d’art dramatique.

La voie du milieu est à la fois:

  1. Une voie de la tempérance reposant sur l’équilibre du sensorium perceptif ainsi que  des fonctions organiques et motrices impliquées et non sur leur seule excitation.
  2. Une pratique de l’attention centrée par l’éveil du sens tonal c’est-à-dire par l’élection d’un centre, en effet, dit «tonique» que les livres d’harmonie appellent souvent aussi et très justement mais sans prendre la portée exacte de la dénomination «centre d’attraction fonctionnelle». Ce centre est la note «tonique» qui attire à elle toutes les autres notes en les reliant (comme le centre d’un cercle tous les points de sa circonférence) selon une syntaxe «fonctionnelle» (une grammaire musicale, si l’on veut) dont la relation Tonique-Dominante est la clé de voûte.

     L’atelier «Parole et Musique» a été pour moi l’occasion de nombreuses surprises. La principale d’entre elles tient à la qualité musicale des thèmes qui ont été découverts par les élèves. J’en retiendrai un seul  que je ne peux décrire sans notions solfégiques, (rythmes et hauteurs); c’est pourquoi j’ai préféré séparer cette description du premier bilan, plus général, et d’une troisième partie plus méthodologique.

II Un thème sur-prise

     Avant tous développements ultérieurs, définissons le mot «thème» dans son acception musicale. Au plus simple le mot thème désigne un air, une petite phrase musicale à laquelle on réduit souvent l’ensemble d’une chanson ou d’une œuvre. Selon son étymologie grecque, le thème est, en effet, ce que l’on pose dès le début de l’œuvre pour la présenter.

 Il n’est peut-être pas inutile de rappeler que les élèves désigné(e)s ici par les initiales de leur prénom, n’avaient aucune formation musicale, chorale ou instrumentale à l’ouverture de l’atelier.

C’était leur chance, finalement, et cela devint aussi celle de l’atelier.

 L’émergence et le développement du thème dont il va être question se sont produits en fin d’année lorsque chacun avait déjà intégré la démarche propre à notre petite communauté. J’emploie les termes de «germe», «thème racine» et «thème fruit» pour désigner les trois phases de la conception puis de l’élaboration, individuelle et collective, d’un thème musical.

     1) Le thème-racine capté au vol et que je joue aussitôt au piano [mi fa sol do (triolet + noire)], m’est très vite renvoyé par D. avec sa «réponse» adéquate [mi fa sol sol] puis [mi fa sol do (8)]

     2) Le thème-fruit (élaboré par les seuls élèves une vingtaine de minutes plus tard) : [sol fa dièse mi b ré do si do ré]  «réponse»  [sol fa dièse mi b ré do si la si] surprend par son émancipation du thème racine,  (changement de mode, changement de ton, inversion des directions asc. /desc. ). Après enquête, – j’étais à ce moment-là   occupé avec les percussionnistes-, ce sont des jeux d’approches plus ou moins volontaires (ou l’heureuse erreur a sa place – jouer une note à la place d’une autre par maladresse etc.-) qui sont à l’origine de la trouvaille.  G. « arrive » sur un motif [sol fa dièse mi b ré] qui plaît à ses deux compagnes qui l’adoptent et D. lui trouve aussitôt son rythme, (les 4 premières notes doublées en croches, noire pointée sur le ré), son « conséquent » [ré do si do ré] (triolet de doubles, noire)  et son heureuse conclusion harmonique […ré do si la si]: le motif est devenu thème.

     Le caractère de ce thème-fruit laisse penser que le thème-racine n’en est pas la seule origine ou la seule cause. La «modalité» et le mouvement descendant de son début sont tout à fait inhabituels pour des oreilles occidentales. Il y a donc certainement plus d’un germe à l‘œuvre, mais parmi ceux-ci, il me semble en déceler un: le joli petit thème un peu orientalisant qui sert de  sonnerie à l’ensemble du collège et ponctue joyeusement sa vie en signalant la fin et la reprise des cours,  [sol fa mi b fa sol sol lab sol …]. Il a pu être un des ingrédients musicaux de la création du thème-fruit. Mais plus encore que la provenance du thème, son hypothétique origine à jamais indécidable, ce qui importe c’est la qualité de conscience requise par son surgissement, la conscience harmonique que suppose sa découverte. A ce moment-là,  elle a servi de guide aux élèves dans la forêt de notes qui ont été jouées par les quatre instrumentistes (deux au piano, deux au synthé.). Elle est à l’origine encore de leur élection du thème et  de la certitude où D. se trouvait de tenir là quelque chose qui «se tenait» et ne pouvait qu’obtenir mon approbation et emporter mon adhésion (qui lui furent très vite signifiées…). La certitude de D. est à elle seule un indice suffisant; elle avait sa «conscience(harmonique)» pour elle!

Quelques éléments de réflexion

Le premier niveau d’analyse convoqué est d’ordre musicosophique. A ce titre, deux passages méritent d’être analysés, du thème-racine au thème-fruit, d’abord, puis, à l’intérieur du thème-fruit, le passage du premier motif au thème «accompli».

     1) Il n’y a pas de progression linéaire entre les deux thèmes, le thème-fruit n’est pas un «conséquent» du thème-racine, à aucun point de vue, mélodique ou rythmique. Leur relation est d’ordre analogique et cette analogie est harmonique La «structure» tonique-dominante (T – D) étant le soubassement commun aux deux thèmes, c’est elle qui a été «analogiquement» transposée.

     2) Le thème-fruit et sa structure interne: d’un premier motif à un thème structuré (le motif initial + sa réponse), on passe d’un chemin mélodique à un cheminement harmonique. Un motif est une succession de notes qui forment un ensemble [sol fa dièse mi b ré], un thème est une totalité qui satisfait, en l’accomplissant, l’intention harmonique implicite dans le motif.

(Par exemple, « ’intention harmonique implicite» du motif – do ré do – est – do sol do – le rapport T-D-T, dont le motif  est une des  expressions mélodiques possibles. Dans notre thème-fruit, «l’intention  harmonique implicite» du motif initial – sol fa dièse mib ré – est sol ré sol – . Elle est à la fois  explicitée et accomplie  par les deux réponses successives – ré do si do ré- puis – ré do si la si -).

De toute évidence, si l’on veut comprendre la nature du passage de l’un à l’autre, il faut chercher ailleurs que dans un procédé d’écriture musicale (variation ou développement) que les élèves ne maîtrisent d’ailleurs absolument  pas. De l’un à l’autre, il y a un véritable saut et ce saut est qualitatif: il résiste autant au maillage circonstanciel des causes et des effets qu’il résisterait à une évaluation du quantifiable (acoustique, statistique etc.).

     Un saut «qualitatif» n’est accessible qu’à une analyse elle-même «qualitative» qui ne se contente pas d’étudier un objet «en soi» mais le considère toujours comme un objet «pour-un-sujet». C’est pourquoi le niveau d’analyse qu’il me semble utile de convoquer ici  est une analyse intentionnelle qui associe chaque mouvement inscrit dans le monde des sons – intervalle, rythme, cadence, thème etc.- à l’intentionnalité spécifiquement musicale qui s’objective en lui. En l’occurrence, une analyse des contenus de conscience – ou, d’ailleurs, d’inconscience –  échouerait à rendre compte utilement d’un mouvement aussi spontanément structuré que le thème «sur-prise» qui nous occupe. Voir en lui une conduite de la conscience (musicale) qui, en définitive, tend à dépasser son propre objet (dominante) pour se saisir elle-même (tonique) peut être une piste féconde. La troisième partie de notre analyse de l’atelier «Parole et Musique» s’engagera sur cette voie.

     Paroles et musique associées dans une même dynamique créatrice fonctionnent, dirait-on,  comme deux langages articulés l’un sur l’autre et reliés analogiquement. L’interaction tonique-dominante (T – D), sert à la fois de moteur à l’inventivité musicale et de support à l’invention verbale qui a elle aussi ses rythmes, ses jeux de consonances et de dissonances et ce «vecteur» harmonique qu’est le sens syntaxique. Nous n’avons pas eu le temps de mettre des mots sur le thème-fruit dont je tente ici de saisir la genèse. Selon le protocole «spontané» dont les trois étapes sont décrites  dans la première partie du bilan, il est probable que les mots choisis, le jeu des rythmes et des rimes nous eurent entraînés vers d’autres sur-prises musicales.

III La profondeur de l’ordinaire

«Ce n’est pas l’extraordinaire qui m’intéresse mais la profondeur de l’ordinaire»

Graf Dürckheim

     L’ordinaire ici, c’est  le thème musical,  et ce qui nous intéresse en lui, c’est sa profondeur. A sa surface, nous trouvons les quelques notes et le rythme qui suscitent notre écoute. En profondeur, il y a  son caractère et le sentiment qu’il éveille en nous. Ce qui nous intéresse, c’est la corrélation entre ce caractère et ce sentiment, au-delà, ou plutôt en deçà, de toute connotation affective et de tout jugement esthétique. L’enquête que nous nous proposons de mener sur l’identité et le sens de la musique, d’une manière générale,  est motivée par la profusion créatrice de l’atelier «Parole et Musique». Cette profusion n’est pas l’effet du hasard mais, croyons-nous, le produit d’une conscientisation d’une structure (dite «cadentielle» rapport T-D) et d’un fond musical commun à tous les acteurs du groupe. Elle est due au simple fait que les adolescents-acteurs de l’atelier ont été mis au contact de leur (tré)fond musical par les dispositions que nous décrivons dans les deux premières parties de notre texte. Nous les rappelons brièvement:

La reprise en  boucle d’un motif très simple, do ré ré do par exemple, lié à un rythme aussi simple, noire croche croche  noire par exemple. Effet de mobilisation et de concentration des énergies. Mais très vite on tourne en rond: on sort du cercle en dirigeant le motif vers la (ou une) dominante, et en reprenant, ensuite, le motif initial. Mouvement parallèle des mots qui vont se greffer sur les notes, une syllabe par note.

     Les paroles, d’abord soumises aux notes et aux rythmes, leur imposent une nouvelle orientation, vers un mouvement cadentiel plus large chargé de donner forme à l’afflux de sens nouveau qu’ils découvrent et qu’ils véhiculent. Extension  vers la dominante qui confirmera celle-ci dans son rôle de contre-pôle fonctionnel, comme simple «réponse» d’une part, ou comme exploration d’un nouveau domaine d’expression non plus seulement orienté vers la dominante mais centré sur elle. Cette dernière possibilité est ce qu’on appelle une «conduite modulante» en harmonie traditionnelle. Conduite qui n’est pas le propre de la seule conscience musicale, mais de toute constitution de sens.

L’identité de la musique

     Les deux conceptions de la musique en nous, conception organique du fœtus immergé dans un monde de sons – immersion pré-natale -, et conception perceptive de l’enfant immergé dans le monde des sons organisés, la musique.

Retenons que tout motif musical, et a fortiori tout thème musical, s’enlève sur un horizon de sens qui est une gamme ou un mode à la fois centré et hiérarchisé. Ce centrage et cette hiérarchie sont le fruit de la rencontre de la conscience et du monde des sons. Conscience une, ramenant à son unité de conscience constituante l’ensemble des sons  perçus

     Toutes les musiques qui depuis notre conception nous habitent et nous composent  sont ainsi nécessairement structurées par le mouvement par lequel la conscience s’emparant du monde des sons le transfigure en musique.

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